11 juil. 2009

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LA VERITE SUR L’AFFAIRE FAIR
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Accident d'auto :
M et Mme Fair, milliardaires américains, décèdent
Problème successoral....
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L’une était une femme exquise,
Richissime, sinon marquise,
A l’automobilisme acquise.

 
L’autre était son chauffeur d’époux.
Ils roulaient tous deux, savez-vous,
A des trains vertigineux, fous.

 
On les voyaient bouffant des lieues
Par monts et vaux, villes, banlieues,
Effrayant moineaux, hochequeues…
 
Hélas d’eux ! Un beau jour, voilà
Que, par la volonté d’Allah,
Notre équipage s’emballa.
 
Ce fut un mystérieux drame :
On retrouva l’homme et la femme
Ayant à Dieu rendu leur âme.
 
Ils étaient là, brisés, auprès
D’un arbre échappé des forêts,
L’auto, non plus, n'était pas frais.
 


Quidedroit fit une écriture
Concluant à la sépulture ;
Mais, de par une loi qui dure,
 
Non sans d’abord vérifier
- Rapport au principe « héritier » -
Qui des deux était mort premier.
 
Il exigea des autopsies,
Avec des scalpels et des scies.
Autant s’éclairer de vessies !
 
Il fit appel à des témoins,
Il n’en était pas. Néanmoins,
Il en vint. On en trouve à moins.
 
Le drame ayant eu lieu près d’Arles,
On vit arriver Pierre et Charles…
Ayant tout vu d’ici, tu parles !
 
Cela dura des mois entiers ;
Cependant que les héritiers
Se fouillaient de la tête aux pieds.
 
Ils eussent pu, coûte que coûte,
Partager la somme, sans doute ?…
Non. Chacun d’eux la voulait toute.
 
Le litige en fût là resté
Quand je ne sais quel « parenté »
Vint établir la vérité :
 


« Il passait - dit-il - sur la route
Juste au moment de la déroute…
- Parle, patenté - l’on t’écoute -

 
« Eh bien ! dont, je suis convaincu
Que la femme un peu survécut
A son mari - plutôt vaincu.
 
« Attendu que, d’une voix forte,
- Si je mens, le diable m’emporte ! -
Elle s’écria : « Je suis morte ! »

 
« Tandis - remarquez bien cela -
Que lui, de sa voix d’au-delà,
Répondit : « Enfin, te voilà ! »
 
 
RAOUL PONCHON
le Journal
10 août 1902

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