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EMIGRATION BRETONNE

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L’émigration des Bretons continue vers le Canada.
Il y aurait intérêt, dit monsieur Combes, à diriger cette énergie colonisatrice vers l’Algérie.
(Journaux)
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Que si les Bretons, voyez-vous -
S’en vont en Amérique,
Abandonnant le ciel si doux
De leur vieille Armorique,

C’est qu’ils sont pris, un peu beaucoup,
Pour votre république
De lassitude et de dégoût.
Et, comme ça s’explique !

Voici trente-quatre ans tantôt,
Qu’ils sont pour vous hors cadre ;
Que vous leur montez des bateaux
De quoi faire une escadre.

Que vous leur déniez un roi
Pour leur en donner mille.
- Et mille qui riment à quoi ? -
Dis-le-me-le, Émile ?

Vous leur parlez de liberté ?
Ils sont toujours esclaves,
Et c’est toujours pour cet été…
Le cidre dans leurs caves.

Vous leur promettiez des secours,
Fût-ce sur vos cassettes,
Lorsque les impôts sont trop lourds.
A cause des disettes ;

A cause que les cieux ingrats
Auront, d’un simple geste,
Aboli l’effort de leurs bras
Sans compter tout le reste.

Et qu’avez-vous fait ? rien du tout ;
Votre séquelle juive
A vomi sur leur manitou
Et sur leur foi naïve,

Pas plus. Des être sont venus
Leur tenir des palabres,
Leur offrir des dieux inconnus,
Sous menace du sabre.

Et vous paraissez étonnés
Que ces paysans rudes
Cherchent des cieux plus fortunés,
Sous d’autres latitudes !

Depuis trente ans et quatre encor
Qu’on leur en fait accroire,
Et qu’ils détiennent le record
De la misère noire !

Du moment qu’ils ne trouvent point,
Par leurs champs et leurs grèves,
A dompter la faim qui les point,
Autrement qu’en un rêve ;

Et du moment que vous tuez
En eux toute espérance ;
Et qu’ils se sentent conspués
Comme Irlandais de France ;

Que voulez-vous ?… Ces gaillards-là
Continuent leur exode
Vers cet excellent Canada
Plus brave et plus commode.

Vous voudriez, je le sais bien,
Que ce fût l’Algérie
Où colonisent ces chrétiens ?…
La belle foutrerie

Pour eux ! le Combes les aurait
Encore sous sa coupe ;
Et quelque Pelletan mettrait
Ses cheveux sur leur soupe !

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RAOUL PONCHON
le Journal
21 août 1904
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LIRE (du même Journal ci-dessus)

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