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LA FÊTE DU TERME

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Oh ! ce n’est pas la bacchanale
De la fête nationale,
Avec des pistons, des tambours.
Point de lampions ni de palmes,
C’est une fête des plus calmes,
Sans bastringues dans les faubourgs.

Cette fête n’est pas mobile.
Elle est carrément immobile.
Elle sévit chaque saison,
Soit en ces mois de pur opprobre,
Janvier, avril, juillet, octobre,
Qui sont l’effroi de la maison.

Car elle n’est pas populaire.
Elle est même tout le contraire,
Et ne vaut pas une chanson.
Et que si - le ciel la confonde !
Elle intéresse tout le monde,
Ce n’est pas de la même façon.


Cette fête bizarre, étrange,
Disons en un seul mot « bit range,
A ceci de particulier,
Et qui fait sangloter la Muse,
Que pour un client qu’elle amuse,
Elle en mécontente un millier.

Elle est donc loin d’être parfaite.
C’est plutôt une demi-fête,
C’est la fête du Terme, quoi !…
S’il faut par son nom qu’on la nomme.
Et tu ne saurais, mon bonhomme,
T’y soustraire, non plus que moi.

*
* ...*

Le quinze est le jour fixe et ferme
Où l’on célèbre ce dieu « Terme »,
Jusque dans le moindre taudis.
Et voici, puisque l’on insiste,
En quoi cette fête consiste :
Le matin donc du jour susdit,

Ton concierge chez toi s’empresse,
A la quatrième vitesse,
Et son bonnet grec à la main,
Et le sourire sur l’oreille
- Bien heureux s’il ne te réveille -
Te tend un vague parchemin.

Ce n’est qu’un papier , dans l’espèce,
Qu’en retour de quelques espèces,
Il t’abandonne volontiers.
Or, cet argent tôt il le porte,
A peine a-t-il passé ta porte,
Chez son patron, puissant rentier !

Alors, plus riche que la veille,
Celui-ci boit une bouteille -
J’aime à le croire - à ta santé.
Et donc, tu vois bien, pauvre type,
Que, de ce fait, tu participes
A la fête, en réalité.

Tu la trouves un peu sévère
Pour toi, qui n’as rien dans ton verre,
Cette fête ?… Mais qu’un chacun
Ayant vidé sa tirelire
N’y trouve pas matière à rire,
Elle amuse toujours quelqu'un.

« Diable ! Et celui qu’elle ruine,
Qu’elle réduit à la famine…
Que fera-t-il ? » Je te réponds
A cela, qu’il a la ressource
D’aller boire de l’eau de source,
Et de fréquenter sous les ponts !


RAOUL PONCHON
le Journal

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