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MEVA, l’HOMME DE LA NATURE
.MEVA, l’HOMME DE LA NATURE
Je suis Méva, et qui me suit est Méva.
Depuis tantôt un mois et plus
Dans Paris se démène
Le syndic des hurluberlus,
Un rare énergumène.
Il est vêtu d’un peignoir blanc,
Et chaussé de sandales,
Nu-tête, et d’un pas insolent
Il arpente nos dalles.
Tel quel il semble un chérubin,
Un saint prêt au martyre,
Ou bien un Christ sortant du bain,
Puisqu’il faut tout vous dire.
Il est Méva, voire il se dit
« L’homme de la Nature »
Et comme Jaurès, il prédit
Une cité future.
Il vend je ne sais quels papiers
Pleins de dictons maussades,
D’axiomes estropiés
Et de Lapalissades.
Et, comme ils sont des abrutis
Sans nulle controverse,
Les Parigots grands et petits
Font marcher son commerce.
*
O Méva de tous points fichu
Ainsi que l »as de pique,
De quelle planète es-tu chu ?
Dis-nous ton rêve épique :
« Dormez l’hiver comme l’été,
Votre fenêtre ouverte.
C’est excellent pour la santé. »
La belle découverte !
« Ne mangez ni chair ni poisson
Rien que de « la » légume.
N’ayez jamais un caleçon
De bain pour tout costume ;
« Vous vivrez mieux comme un corbeau,
Gardez-vous des alcôves
Plus de souliers, plus de chapeau
Et plus de têtes chauves.
« Voyez mes cheveux fabuleux. »
Qu’est-ce que ça prouve ?
C’est que ton système pileux
Est celui d’une louve.
« Ne respirez qu’avec le nez,
Vous n’aurez plus de rhumes
Vivez sous des yeux moins bornés,
Evitez les bitumes.
« Buvez de l’eau. Jamais d’alcool. »
Cela ne nous divise :
Sans vouloir me pousser du col,
C’est ma propre devise.
Tu jures encore ta foi
Qu’en suivant ton régime,
On devient Méva comme toi,
Tant pis, à mon estime.
Enfin, tu te moques de nous,
Ou, tu nous injuries
En nous débitant pour dix sous,
De ces niaiseries…
*
D’ailleurs, ô Méva que voilà,
Un souci me torture :
Que si tu es tant que cela
L’homme de la Nature,
Que viens-tu faire en nos cités,
Emmi nos sombres villes ?
Laisse là nos humanités
Si vagues et si viles.
Tu nous dis : retournez au sol,
En des phrases niaises.
Et tu viens ici, pauvre fol,
Nous prendre nos punaises.
Va-t-en dormir sous le ciel bleu
Et les chastes étoiles.
Puisque tu prétends à ce jeu,
Ravigoter tes mœlles.
Depuis tantôt un mois et plus
Dans Paris se démène
Le syndic des hurluberlus,
Un rare énergumène.
Il est vêtu d’un peignoir blanc,
Et chaussé de sandales,
Nu-tête, et d’un pas insolent
Il arpente nos dalles.
Tel quel il semble un chérubin,
Un saint prêt au martyre,
Ou bien un Christ sortant du bain,
Puisqu’il faut tout vous dire.
Il est Méva, voire il se dit
« L’homme de la Nature »
Et comme Jaurès, il prédit
Une cité future.
Il vend je ne sais quels papiers
Pleins de dictons maussades,
D’axiomes estropiés
Et de Lapalissades.
Et, comme ils sont des abrutis
Sans nulle controverse,
Les Parigots grands et petits
Font marcher son commerce.
*
O Méva de tous points fichu
Ainsi que l »as de pique,
De quelle planète es-tu chu ?
Dis-nous ton rêve épique :
« Dormez l’hiver comme l’été,
Votre fenêtre ouverte.
C’est excellent pour la santé. »
La belle découverte !
« Ne mangez ni chair ni poisson
Rien que de « la » légume.
N’ayez jamais un caleçon
De bain pour tout costume ;
« Vous vivrez mieux comme un corbeau,
Gardez-vous des alcôves
Plus de souliers, plus de chapeau
Et plus de têtes chauves.
« Voyez mes cheveux fabuleux. »
Qu’est-ce que ça prouve ?
C’est que ton système pileux
Est celui d’une louve.
« Ne respirez qu’avec le nez,
Vous n’aurez plus de rhumes
Vivez sous des yeux moins bornés,
Evitez les bitumes.
« Buvez de l’eau. Jamais d’alcool. »
Cela ne nous divise :
Sans vouloir me pousser du col,
C’est ma propre devise.
Tu jures encore ta foi
Qu’en suivant ton régime,
On devient Méva comme toi,
Tant pis, à mon estime.
Enfin, tu te moques de nous,
Ou, tu nous injuries
En nous débitant pour dix sous,
De ces niaiseries…
*
D’ailleurs, ô Méva que voilà,
Un souci me torture :
Que si tu es tant que cela
L’homme de la Nature,
Que viens-tu faire en nos cités,
Emmi nos sombres villes ?
Laisse là nos humanités
Si vagues et si viles.
Tu nous dis : retournez au sol,
En des phrases niaises.
Et tu viens ici, pauvre fol,
Nous prendre nos punaises.
Va-t-en dormir sous le ciel bleu
Et les chastes étoiles.
Puisque tu prétends à ce jeu,
Ravigoter tes mœlles.
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Mange tes légumes - chez eux,
Va boire de l’eau saine
Aux sources, dans les bois ombreux
Et non de l’eau de Seine.
Et comme tu te dis partout
L’homme de la Nature,
Ne vends pas, ni ne fais surtout
De la littérature.
RAOUL PONCHON
Le Journal
25 juin 1906
Mange tes légumes - chez eux,
Va boire de l’eau saine
Aux sources, dans les bois ombreux
Et non de l’eau de Seine.
Et comme tu te dis partout
L’homme de la Nature,
Ne vends pas, ni ne fais surtout
De la littérature.
RAOUL PONCHON
Le Journal
25 juin 1906
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