22 févr. 2008

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UNE LETTRE DE LOUIS XIII
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On a découvert aux Archives de Marseille une lettre de Louis XIII, adressée au sultan Amurat - non décachetée.
(Journaux)
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Donc, en la cité marseillaise,
Ces messieurs de l’édilité
Auraient, ces jours-ci, dégoté
Une lettre de Louis Treize
Adressée au sieur Amurat,
Une sorte de scélérat,
Sultan de la Sublime-Porte
A cette époque, et que out porte
A croire sans nul intérêt,
Sans valeur aucune, sans gloire ;
Car, s’il eût marqué dans l’histoire,
Comme dit l’autre, on le saurait.


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*... *


Cette lettre - par quelle mystère -
N’avait donc que jamais été
Transmise à son destinataire.
On y voit encore bouté
Le sceau royal de Louis Treize
Ce qui prouve, entre parenthèse,
Que la poste, sous ce tyran,
Eût fait envie à Simyan.


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* ...*

Quoi qu’il en soit de cette lettre
Datant de quelque trois cents ans,
Ces bons édiles crurent être
Le jouet d’un rêve plaisant.
Après l’avoir manipulée
En tous les sens, et contemplée,
Ils se firent un point d’honneur
D’en laisser close la teneur.
Ils remirent dans leurs archives
Cette douairière des missives.
Pourquoi ce scrupule, ô seigneur ?

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* ...*


Il nous faut leur voter un blâme,
A ces édiles marseillais.
Je trouve, pour mon compte, infâme
Qu’ils nous dérobent ces feuillets.
C’est un document historique
Appartenant à la fabrique,
Je veux dire à la nation,
Depuis la Révolution.
Qu’est-ce qu’il pouvait bien écrire,
On se demande, notre Sire,
A cet insipide Amurat ?
Lui proposait-il un contrat ?…
Était-ce une lettre pour… rire ?
Lui demandait-il des houris,
Afin d’égayer ses pourpris ?…
C’est peu probable. Des volailles,
Il en avait plein son Versailles.
D’ailleurs, il s’en souciait peu.
Mon Dieu ! Cette lettre, il se peut
Qu’elle n’ait rien de péremptoire,
Dont je fais un si grand état ;
Et cependant, j’aime mieux croire
Qu’elle tranchait un point d’histoire,
Renfermait un secret d’état.


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*... *


Et voilà la cause entendue.
Pour tout le monde, elle est perdue.
C’eût été plus spirituel
D’adresser ce royal message
A ce vieux Grand-Turc actuel,
Dont c’est l’évident héritage.
Ils ne l’ont pas fait, imprudents !
Car, qui sait si précisément dans
Cette lettre qu’ils n’ont point lue,
Ne se trouvait pas résolue
L’âpre question d’Orient ?…
Il est encor temps, Simyan !



RAOUL PONCHON

Le Journal
26 avril 1909
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