26 févr. 2008

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LA REINE DE HOLLANDE
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Cette reine Wilhelmine
A, d’ailleurs, fort bonne mine ;
On connaît rien qu’à la voir,
Qu’elle est de riche nature
Et ne fait pas sa pâture
Des seuls soucis du pouvoir.


Non pas qu’elle les néglige,
Grands dieux ! ni que son prestige
S’en trouve diminué !
Mais l’un n’empêche pas l’autre,
C’est mon avis et le vôtre,
Pour un cœur bien situé.

Elle se comporte à table
D’une façon remarquable,
Si j’en crois de bons témoins
De son pays de kermesses ;
Et son mari Son Altesse
Le prince consort, pas moins…


Maintenant, je me demande
Si cette Altesse allemande
A bon estomac, ou si
C’est par pure bonté d’âme
Qu’il mange autant que madame ?…
Cela se peut bien aussi.
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Car en ce ménage étrange
De Mecklembourg et d’Orange,
Sans qu’il soit assombri,
C’est, selon le strict programme,
Le mari qui suit sa femme,
Non la femme son mari.

Et tout se passe à merveille.
C’est elle seule qui veille
Sur ses braves Hollandais ;
Ils vivent en harmonie,
Sous son bienfaisant génie,
Les vieux comme les cadets.

Aussi, tandis que les princes
S’agitent dans leurs provinces,
Où rien ne marche à souhait,
Son peuple est heureux, sans cesse…
Il y suffit de sa grâce
Et de ses yeux de bluet.

J’estime que sa couronne
De simples roses fleuronne,
Et que c’est son jardinier
Qui, pour sceptre et… le principe,
Lui fournit une tulipe
Plus facile à manier.

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* ...*



C’est cette douce princesse
A qui Paris fait largesse
De son accueil écossais,
Et non pas en clameurs vaines…
N’a-t-elle pas, en ses veines,
Quelque peu de sang français ?

Il suffit donc d’une femme
Pour, sans secousse et sans drame,
Faire un pays consistant…
Ah ! si notre Marianne,
Qui ne songe qu’à sa panne,
Pouvait nous en dire autant !



RAOUL PONCHON
Le Journal
03 juin 1912

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