.
.
.
.
A Hugues Delorme
O Hugues, maître revuiste
Qui comme artiste et moraliste
Triomphez à votre Scala,
Vous connaissez la guerre pire *
Eclose en le Céleste-Empire.
Hein ? Que pensez-vous de cela ?
Mon Dieu, des histoires de guerre
Tous deux ne nous émeuvent guère,
On ne peut tout faire à la fois.
- Comme, disait ce virtuose
D’Anacréon, ivre de rose : *
« Allez combattre, moi je bois. » -
Pourtant, en dehors de ma cave,
Il est tel évènement grave
Qui force mon attention ;
Ainsi ce qui se passe en Chine
Est un de ceux-là, j’imagine,
Ou je me fais illusion.
Cette Chine sempiternelle
A-t-elle assez fait parler d’elle !…
Vous rappelez-vous les tournois
D’ignorance qu’était la nôtre ?
On se demandait l’un à l’autre
Ce que c’était que les Chinois ?
L’un voulait qu’ils fussent des zèbres
Encor plongés dans les ténèbres…
Des magots et des matagots…
- Il était plus dans le vrai, certes -
Et l’autre des oranges vertes
Que l’on confit dans des bocaux.
Eh bien, nous voyons à cette heure
Que la Chine n’est point un leurre,
Pas plus que ses rébellions
Ne sont l’apparence d’une ombre,
Puisque les Chinois sont en nombre
De quatre ou cinq cents millions.
Ils ont comme force motrice
Une sacrée impératrice
A l’œil oblique, au nez camard,
Auprès de qui nos politiques,
Nos conseillers les plus auliques,
Ne sont que de piteux jumarts.
Ils ont une manie étrange :
Se gratter quand ça les démange ;
Ils mordent quand ils sont mordus ;
Ils détestent notre conquête,
Ils n’aiment pas qu’on les embête :
C’est de drôles d’individus.
Ils regardent au microscope
Toutes les forces de l’Europe
Sans pouvoir bien les discerner ;
Ils savent que si l’on insiste,
Aussi tranquilles que Baptiste,
Ils pourront un jour les cerner.
Une indication dernière :
Ils ont une queue au derrière
Et sont jaunes comme des coings.
Hugues, c’est ça le « péril jaune ».
Chaque jour il grandit d’une aune,
Voilà qui nous en bouche un coin.
Raoul Ponchon
Le Journal
09 juillet 1900
A Hugues Delorme
O Hugues, maître revuiste
Qui comme artiste et moraliste
Triomphez à votre Scala,
Vous connaissez la guerre pire *
Eclose en le Céleste-Empire.
Hein ? Que pensez-vous de cela ?
Mon Dieu, des histoires de guerre
Tous deux ne nous émeuvent guère,
On ne peut tout faire à la fois.
- Comme, disait ce virtuose
D’Anacréon, ivre de rose : *
« Allez combattre, moi je bois. » -
Pourtant, en dehors de ma cave,
Il est tel évènement grave
Qui force mon attention ;
Ainsi ce qui se passe en Chine
Est un de ceux-là, j’imagine,
Ou je me fais illusion.
Cette Chine sempiternelle
A-t-elle assez fait parler d’elle !…
Vous rappelez-vous les tournois
D’ignorance qu’était la nôtre ?
On se demandait l’un à l’autre
Ce que c’était que les Chinois ?
L’un voulait qu’ils fussent des zèbres
Encor plongés dans les ténèbres…
Des magots et des matagots…
- Il était plus dans le vrai, certes -
Et l’autre des oranges vertes
Que l’on confit dans des bocaux.
Eh bien, nous voyons à cette heure
Que la Chine n’est point un leurre,
Pas plus que ses rébellions
Ne sont l’apparence d’une ombre,
Puisque les Chinois sont en nombre
De quatre ou cinq cents millions.
Ils ont comme force motrice
Une sacrée impératrice
A l’œil oblique, au nez camard,
Auprès de qui nos politiques,
Nos conseillers les plus auliques,
Ne sont que de piteux jumarts.
Ils ont une manie étrange :
Se gratter quand ça les démange ;
Ils mordent quand ils sont mordus ;
Ils détestent notre conquête,
Ils n’aiment pas qu’on les embête :
C’est de drôles d’individus.
Ils regardent au microscope
Toutes les forces de l’Europe
Sans pouvoir bien les discerner ;
Ils savent que si l’on insiste,
Aussi tranquilles que Baptiste,
Ils pourront un jour les cerner.
Une indication dernière :
Ils ont une queue au derrière
Et sont jaunes comme des coings.
Hugues, c’est ça le « péril jaune ».
Chaque jour il grandit d’une aune,
Voilà qui nous en bouche un coin.
Raoul Ponchon
Le Journal
09 juillet 1900
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire