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LOTI
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Loti *, loin de son frère Yves, *
Près des rives
Qu’arrose le pont des Arts,
Vient mouiller sous la Coupole,
Nécropole
Où dorment nos vieux lézards.
Il a, selon la coutume, *
Un costume
Tout persillé de cerfeuil,
Une épée - oh ! négative,
Qu’inactive !
Qu’il se met parfois dans l’œil.
Avec Renan et Mézières
Pour lisières.
A tribord et à babord,
Il s’asseoit, met sa perruque
Et reluque
Le vilain sexe, d’abord.
Quand, au bout d’une minute,
L’Institute
Lui dit : C’est assez t’asseoir,
Largue tout, vas-y, commence
Ta romance » ,
Il tient le suivant crachoir :
*
* *
Ma douleur est vive
Et grand mon souci :
Mon brave frère Yve
N’étant pas ici.
On eût pu - ce semble -
Lui faire de l’œil,
Nous nommer ensemble
Au même fauteuil.
Ce bougre que j’aime,
D’ailleurs parlerait
Bien mieux que moi-même
D’Octave Feuillet.
*
* *
O Feuillet * ! O Clave !
Sous-Emile Augier,
Quel métier d’esclave,
De t’élogier !
Je dis d’esclave ivre ;
J’en suis jà moulu,
D’autant que ton livre
Je ne l’ai pas lu ;…
Non plus qu’autre chose,
Je ne lis jamais
Que ma propre prose…
Et encore… mais
Yve, en quelque sorte
Lit fort couramment ;
Ce qu’ici j’apporte,
C’est son jugement :
*
* *
« Ce roi des ganaches
Feuillet est donc mort !
Que dire des vaches
Qui vivent encore ?
« De Goncourt ?… ah, mince !
Il me fout des rots,
Daudet est trop mince
Et Zola trop gros.
« Le naturalisme
Est du sous-caca,
Le psychologisme
Du re-sous-caca ;
« Parmi - Dieu les damne ! -
Les jeunes sujets,
Prévost est un âne
Vêlé par Bourget…
« Vois-tu, mon vieux frère,
Il faut leur montrer
A tous ton derrière…
Et… pare à virer… »
Voilà, chers convives,
Ce que me disait
Mon brave frère Yves
Qui s’y connaissait.
*
* *
Là-dessus et non sans grâce,
Il repasse
Son habit à Zola,
Puis il va revoir sa veuve
Près du fleuve
Qu’on nomme Bitazola. (1)
R.P
le Courrier Français - 17 avril 1892
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(1) on dit aussi Bidassoa
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