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Un homme ordinairement sobre, qui se grise,
est aussi bête
qu’un homme ordinairement gris, à jeun.
(STERNE)
Jadis j’abhorrais le champagne
Et l’ivresse qui l’accompagne,
Contrairement à ma… compagne.
Et dans mon gosier, ce ravin,
Il coulait lamentable et vain :
Il ne me semblait pas du vin.
Je le trouvais sans corps, sans âme :
Ma langue me votait un blâme
Quand je lui infligeais l’infâme.
Que sais-je encore ?… Mon palais
Lui disait : « Où sont tes mollets,
Espèce de manche à balai ? »
Bref il me semblait vent et mousse,
Un rien du tout qui se trémousse…
Ou - pensais-je - mon goût s’émousse.
Et j’avais donc lâché d’un cran
Ce vin aussi plat qu’un ruban,
Quand je connus monsieur Jourdan
(Que Dieu l’assiste et l’accompagne !)
Qui me dit : « Tu bats la campagne :
« Il y a Champagne et Champagne,
« Tu penses bien. Bois celui-ci,
« Et dis-moi s’il est réussi
« En tant que Champenois, et si
« C’est dans la plaine de Montrouge
« Qu’il est né, ou dans la Mer Rouge ?
« C’est du G.-H. Mumm CORDON ROUGE !
« Sache que jusques à Khartoum
« On chante plus ce G.-H. Mumm
« Qu’on ne fait l’air : Ta ra ra boum.
« Bientôt ( cet avis est le nôtre )
« Tu t’en feras l’ardent apôtre,
« Et tu n’en boiras jamais d’autre. »
Et je bus ce Mumm, stupéfait,
Car c’était du vin , en effet.
Et mon gosier crut qu’il rêvait.
Et j’en bus un verre, deux verres,
Trois verres, quatre, cinq, six verres,
Dix verres, douze et quinze verres
Impunément, pleins jusqu’au bord,
Moi qui me méfiait d’abord
D’aller de tribord à babord.
Or, loin de me casser la tête
Il me mit la cervelle en fête,
Comme le vin le plus honnête ;
Je connus qu’il était vêtu
Du manteau de triple vertu
En brave fils du bois tortu…
Ah ! Pour dire la chère vigne
Qui nous vaut ce champagne insigne
Il faudrait un chanteur plus digne
Que moi, cher monsieur Jourdanoum,
Et des rimes bien plus en oum
Pour rimer avec G.H. Mumm
Cordon rouge !
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