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EAUX et AUTRES…
.EAUX et AUTRES…
J’ai reçu le Journal avec les lignes ci-dessous soulignées au crayon rouge :
« Guides Joanne : monographie du Mont-Dore, la Bourboule et St Nectaire, 1 fr. »
A mon ami Charles Archbold.
Un bon fumiste, en vérité,
S’est fichu de ma boule,
En me conseillant, cet été,
Les eaux de la Bourboule.
C’est vrai qu’il me permet aussi
Celles de Saint-Nectaire,
Et du Mont-Dore, Dieu merci !
Selon… mon caractère.
Il est gai, le bougre ! Après ça,
C’est peut-être un brave homme
De lecteur qui s’intéresse à ma santé ;
Car, en somme,
Je ne puis guère m’attarder
A cette conjecture
Qu’il veuille me recommander
Une simple lecture…
N'importe. Il me plongea d’abord
Dans une gaîté dense
Ce conseil généreux, rapport
A la coïncidence…
Je dois vous dire tout à trac,
Qu’à l'heure où je vous parle,
Je fais ma cure à Bergerac
Avec mon ami Charle ;
Cet homme des temps préhistos,
Aussi bon qu’il est brave
M’administre dans des cristaux
Tous les vins de sa cave.
Il m’en gorge matin et soir.
Ah ! mon Dieu que je souffre !
A peine ai-je un temps pour m’asseoir,
Sapristi ! bigre ! bouffre !
Or donc, c’est pendant que j’étais,
L’autre jour, à sa table,
Et qu’à plein verre je tétais
Son vin indiscutable
Un de ces jolis crus amis
Sans haine et sans colère,
Que le Journal me fut remis
M’incitant à l’eau claire.
Cela nous amusa beaucoup,
Ça tombait à merveille !
Ma foi, nous en bûmes du cou
Une vieille bouteille
De vin point du tout hasardeux.
Voire - pourquoi m’en taire ? -
Nous en foutîmes tous les deux
Trois bouteilles par terre.
Ça valait bien ça, Dieu vivant !
Ou je deviens maboule.
Non, mais, me voyez-vous buvant
Des eaux de la Bourboule ?
Non, n’est-ce pas ? Et, me prend-il,
Ce conseiller perfide,
Pour un dont le corps en péril
Est usé, vieux et vide ?
Je ne suis plus jeune, c’est vrai.
Mais quoi ! pas davantage.
Et je puis encore, à mon gré,
Jouer mon personnage.
Et je dois ma belle santé
Au sang pur de la vigne
Par qui le mien est enchanté,
Et dans mon cœur trépigne.
Il ne m’est jamais arrivé
De boire de l’eau claire :
Je m’en suis toujours bien trouvé.
Que voulez-vous y faire ?
Je dis que croire à la vertu
De l’eau, c’est grand’ faiblesse :
Autant prendre un bouillon pointu,
Le gosier ne s’y blesse.
Boire de l’eau ! Quand hier encor
Le docteur Chantemesse,
Dont j’écoute le verbe d’or
Comme je fais la messe,
Me disait : « Garde-toi de l’eau
Ainsi que de la peste ;
Bois du vin, c’est plus rigolo,
Et fiche-toi du reste ! »
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« Guides Joanne : monographie du Mont-Dore, la Bourboule et St Nectaire, 1 fr. »
A mon ami Charles Archbold.
Un bon fumiste, en vérité,
S’est fichu de ma boule,
En me conseillant, cet été,
Les eaux de la Bourboule.
C’est vrai qu’il me permet aussi
Celles de Saint-Nectaire,
Et du Mont-Dore, Dieu merci !
Selon… mon caractère.
Il est gai, le bougre ! Après ça,
C’est peut-être un brave homme
De lecteur qui s’intéresse à ma santé ;
Car, en somme,
Je ne puis guère m’attarder
A cette conjecture
Qu’il veuille me recommander
Une simple lecture…
N'importe. Il me plongea d’abord
Dans une gaîté dense
Ce conseil généreux, rapport
A la coïncidence…
Je dois vous dire tout à trac,
Qu’à l'heure où je vous parle,
Je fais ma cure à Bergerac
Avec mon ami Charle ;
Cet homme des temps préhistos,
Aussi bon qu’il est brave
M’administre dans des cristaux
Tous les vins de sa cave.
Il m’en gorge matin et soir.
Ah ! mon Dieu que je souffre !
A peine ai-je un temps pour m’asseoir,
Sapristi ! bigre ! bouffre !
Or donc, c’est pendant que j’étais,
L’autre jour, à sa table,
Et qu’à plein verre je tétais
Son vin indiscutable
Un de ces jolis crus amis
Sans haine et sans colère,
Que le Journal me fut remis
M’incitant à l’eau claire.
Cela nous amusa beaucoup,
Ça tombait à merveille !
Ma foi, nous en bûmes du cou
Une vieille bouteille
De vin point du tout hasardeux.
Voire - pourquoi m’en taire ? -
Nous en foutîmes tous les deux
Trois bouteilles par terre.
Ça valait bien ça, Dieu vivant !
Ou je deviens maboule.
Non, mais, me voyez-vous buvant
Des eaux de la Bourboule ?
Non, n’est-ce pas ? Et, me prend-il,
Ce conseiller perfide,
Pour un dont le corps en péril
Est usé, vieux et vide ?
Je ne suis plus jeune, c’est vrai.
Mais quoi ! pas davantage.
Et je puis encore, à mon gré,
Jouer mon personnage.
Et je dois ma belle santé
Au sang pur de la vigne
Par qui le mien est enchanté,
Et dans mon cœur trépigne.
Il ne m’est jamais arrivé
De boire de l’eau claire :
Je m’en suis toujours bien trouvé.
Que voulez-vous y faire ?
Je dis que croire à la vertu
De l’eau, c’est grand’ faiblesse :
Autant prendre un bouillon pointu,
Le gosier ne s’y blesse.
Boire de l’eau ! Quand hier encor
Le docteur Chantemesse,
Dont j’écoute le verbe d’or
Comme je fais la messe,
Me disait : « Garde-toi de l’eau
Ainsi que de la peste ;
Bois du vin, c’est plus rigolo,
Et fiche-toi du reste ! »
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RAOUL PONCHON
Bergerac, 2 juillet
Le Journal
05 juillet 1897
RAOUL PONCHON
Bergerac, 2 juillet
Le Journal
05 juillet 1897
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