30 janv. 2009

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PATRICK
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La reine a décidé que le dernier né du duc d’York s’appellerait Patrick.
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« Que pourrais-je bien faire
Pour plaire à ma sévère
Et chère verte Erinn ?»
Disait la queen

A sa vieille fripouille
De Chamberlain, qui souille
La voûte du ciel bleu
Et l’air de Dieu.

« Donne-moi quelque idée,
O mon brave Asmodée !
Toi qui as le cerveau
Gros comme un veau.


« Vois comme ils sont en joie
Dès l’instant qu’ils me voient
Mes braves Irlandais.
Je veux donc dès

« Aujourd’ hui - que j’y pense -
Qu’ils aient leur récompense :
Demain je ne saurais
Y songer très.



« Les autoriserai-je
A suivre mon cortège ?
A me faire un cadeau
Sur un plateau ?…


« Permettrai-je qu’ils aillent
Dans le sein des batailles
En quelque Inde ou Transvaal,
A pied, à ch’val,

« Se faire pour leur reine
Massacrer par centaine ?
Ce serait assez beau
Mais pas nouveau

« Au surplus, dans la brousse,
Aussi vrai que je tousse
En ce moment, mon bon,
C’est-ce qu’ils font.

Cherchons donc autre chose…
Je pourrais, mais je n’ose
Leur offrir mon cabas…
Je ne puis pas.

« Leur accorder le titre
- Avec voix au chapitre -
De citoyen anglais…
Regarde-les :


« Ils n’en ont ni la mine,
Rapport à la famine,
Ni l’échine surtout,
Ni rien du tout.

« Ce sont de pauvres diables
Piteux et lamentables
Sans conversation
N’instruction…


« Ah ! ah ! j’y suis… j’y pense
Je tiens leur récompense,
Un don joyeux, vraiment,
D’avènement


« Qui leur plaira peut-être :
Vient-il pas de me naître
Dans le pays du porc,
Je veux dire York,

« Un deux cent trente-unième
Petit-fils… ou deuxième,
Je l’appelle Patrick,
Ça tombe à pic.


« Qu’en penses-tu, pécore ?
C’est un rien, mais encore
Il fallait arriver
A le trouver. »



RAOUL PONCHON
Le Courrier Français
29 avril 1900

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