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LE REGENT
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Or, ces jours derniers, un larron
-Me suis-je laissé dire -
Dans ta galerie, Apollon !
Tenta de s’introduire.
On en a conclu sur -le-champ,
Sans doute à la légère,
Qu’il comptait voler « le Régent ».
Je crois qu’on exagère.
Qui sait si ce n’en était pas
Un, pour qui la peinture
Et l’objet d’art ont plus d’appas
Que cette pierre dure ?
Ou bien encore un député
Désireux de connaître
Si le Louvre était bien gardé ?
Cela pourrait bien être.
*
*... *
-Me suis-je laissé dire -
Dans ta galerie, Apollon !
Tenta de s’introduire.
On en a conclu sur -le-champ,
Sans doute à la légère,
Qu’il comptait voler « le Régent ».
Je crois qu’on exagère.
Qui sait si ce n’en était pas
Un, pour qui la peinture
Et l’objet d’art ont plus d’appas
Que cette pierre dure ?
Ou bien encore un député
Désireux de connaître
Si le Louvre était bien gardé ?
Cela pourrait bien être.
*
*... *

Quoi qu’il en soit, ledit Régent
Est toujours à sa place,
Admirablement réfringent
Sous une triple glace.
Mais admettons qu’il soit volé,
Un beau jour - tout arrive -
Je n’en serais pas désolé
D’une façon bien vive.
Le Régent ! Excusez du peu !
-Diront des gens illustres -
Le Régent si pur, dont le feu
Ferait pâlir cent lustres !
C’est le plus fameux diamant,
Passant toute hyperbole,
Qu’il y ait sous le firmament.
Il vaut des sommes folles !
A cela je leur répondrai :
Parbleu, je ne l’ignore.
C’est un fort beau joyau, c’est vrai ;
Mais il faudrait encore
Cent mille fois son pesant d’or,
Pour peu qu’on en raisonne,
C’est une fortune qui dort
Et ne sert à personne.
A la rigueur on comprendrait
Si, dans les jours de fête,
Notre Marianne en parait
Sa poitrine ou sa tête.
Ou que, chaque an et tour à tour
Un jour on l’abandonne
A la Reine des Reines, pour
Egayer sa couronne…

Mais non. On garde ce Régent,
Avec sollicitude,
Pour épater les bonnes gens,
La pauvre multitude ;
Sous prétexte que rarement
On ne vit plus splendide
Et plus absolu diamant,
Et d’une eau plus limpide.
Certes ! Il est d’une belle eau ;
Mais combien je préfère
Une œuvre d’art, un bon tableau
Que le génie éclaire !
Les Régents ne remuent pas,
C’est certain, à la pelle…
Mais la chose rare n’est pas
Nécessairement belle.
A ce compte-là, mes enfants,
- J’en appelle à vous-mêmes -
Tels objets sont plus esbrouffants
Que la susdite gemme ;
Ainsi, l’homme à tête de veau
Est au moins aussi rare.
Il n’en est pour cela plus beau,
Ou ma raison s’égare !
RAOUL PONCHON
Le Journal
29 janv. 1908
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