8 oct. 2007

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à mon ami
Raoul Ponchon



Y’a-t-i’ rien qui vous agace
Comm’ ces espèc’s de paquets
Qui souffl’nt dans des cors de chasse,
à la port’ des mastroquets !
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L’restant d’l’année, dans des caves
Et dans des sous-sols profonds,
I’s fil’nt des sons clairs ou graves
Qui n’travers’nt pas les plafonds.
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Mais, quand l’carnaval rapplique,
Tous les ans, ces drôl’s de corps
Sortent, sur la voi’ publique,
Nous raser avec leurs cors.
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Sur le trottoir qui se couvre
D’un tas d’badauds, i’s sont là
Cinq ou six ballons du Louvre
à nous servir le mêm’ plat.
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Des musiqu’s toujours pareilles,
De couacs émaillant leurs airs,
Qui vous cassent les oreilles
Et vous tapent sur les nerfs.
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Avec tout l’vent qu’aux étoiles
I’s jett’nt pour fair’ les malins,
On f’rait gonfler deux cents voiles
Et tourner plus d’cent moulins.
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I’s m’ canul’nt tous ces Borées !
J’aim’ mieux l’Jésus-Christ d’Zola.
J’en ai soupé d’leurs « curées » !
Leurs « hallalis », ah ! la ! la !
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Les sonneurs, je leur dis : « flûte !»
I’s f’raient bien mieux d’nous offrir
Un solo d’violon ou d’flûte.
Les cors, moi, ça m’fait souffrir.
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I’s sont là, f’sant des giries
Devant l’public amassé,
Pour écouter leurs sonn’ries,
Avec un’ cédill’ sous l’C ?
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Quand j’en rencontr’, su’ la place,
Soufflant, d’vant l’monde arrêté,
ça m’fait jouer du cor de chasse,...
Mais pas par le mêm’ côté !



JULES JOUY
Le Cri du Peuple
15 février 1888

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