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Au Général Boum... langer
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Général, un conseil. Ayez l'air moins candide.
Evidemment, parbleu ! votre sort est splendide ;
La vache République a les pis pleins de lait
Certes. Pitit moceau galon (1) ne vous déplait
Pas trop ? Je le veux bien. Mais lorsque Joséphine,
J'ai nommé Clémenceau, qui fait votre cuisine,
Et qui s'est pris pour vous, pourquoi ? d'un si beau feu
Que votre grand cordon lui-même en devient bleu,
Vous donne du César, et puis du Charlemagne,
Du Marcellus eris, dit-on à la campagne ;
Il ne faudrait jamais avoir mangé du pain
Pour douter un instant qu'il vous pose un lapin.
Avec votre oeil qui rit, perdu dans votre barbe,
Le torse épais de croix, comme l'est de joubarbe
Un mur, vous faites tort à la belle Fatma,
Car on vous prend toujours pour un panorama.
On devient tant qu'on veut un cardinal ministre,
Mais il est de bon goût d'avoir la pourpre bistre,
L'oeil simple, le cheveu qui ne s'abuse point ;
Mais croire à tour de bras que c'est arrivé ? Foin !
Une telle candeur fait rire ma famille,
Quand à moi, de plaisir je me recroqueville.
Te figures-tu donc que ceci durera ?
Vois-tu, la république est comme un opéra,
Cela finit toujours ; heureusement pour elle
Et pour nous ; elle ira dans la boîte à Poubelle.
Tu la retrouveras quelque jour. Crois-tu donc
Que tu vas voir quiconque, en son mol abandon,
Attendre et t'astiquer ? Depuis quand, pauvre guèbre,
Vit-on plusieurs lions fuir devant un seul zèbre ?
Si tu crois que tu peux, quand nous buvons de l'eau,
Te rincer les crochets avec du bon lolo ;
Si tu crois qu'il suffit de brandir ton grand sabre
Pour que la barbe pousse à qui doit rester glabre ;
Ote-toi de l'esprit ce rêve enchanteur. Crois
Q'un marchand de cirage a mérité la croix ;
Crois que l'Académie est un endroit folâtre,
Qu'Ohnet a sur son dos la bosse du théatre,
C'est bien. Mais ne crois pas en toi, c'est malséant.
Tu vas rentrer bientôt dans le sein du néant :
Ma montre à huit rubis sonne déjà ton heure,
C'est pas toujours les mêm's qu'aura l'assiette au beurre !
RAOUL PONCHON
le Courrier Français
(1) Expression nègre.
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