15 sept. 2007

Quel fichu caractère !

A propos de Ponchon, Roland Dorgeles écrit :

Il savourait les fromages, reprenait du dessert, vidait un bon verre d’armagnac et s’en allait d’un pied ferme.
A près de quatre-vingt-dix ans !
Souvent je le reconduisais sur la rive gauche, mais parfois il voulait partir seul et je le regardais avec épouvante franchir l’avenue de l’Opéra ou le boulevard. Il s’y prenait d’une curieuse façon, fermant à demi les yeux et fonçant droit devant lui, en brandissant son parapluie.


Les chauffeurs freinaient, lançant des injures, les femmes poussaient des cris d’effroi. Mais non, tout se passait bien, et par miracle il atteignait l’autre rive.

Ce n’est d’ailleurs pas en traversant une rue qu’il s’est cassé le col du fémur, mais tout bonnement en descendant de son lit. Il piqua là une de ses pires colères, accusant le destin, le tapis, le lit, le garçon, et, pour se venger, refusa énergiquement de se laisser emmener à l’hôpital.
Les Richepin, le médecin, le chirurgien, durent joindre leurs instances pour le persuader.
Me rendant à Saint-Joseph, je m’attendais à le trouver furibond, pestant contre le sort et rabrouant les religieuses, or l’espoir d’être bientôt remis d’aplomb l’avait calmé ; il s’était soumis sans se débattre à tous les examens et même, je n’en croyais pas mes yeux, souriait à la bonne sœur qui lui présentait une tisane.


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