13 sept. 2007

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L'HIRONDELLE et LE COCHON
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L'hirondelle dit au cochon :
" Allons, au revoir, vieux cochon.
Barbotte, mon ami, barbotte
Dans ton purin et dans ta crotte,
Reste éternellement le nez
Fourré dans tes eaux de vaisselles.
Pour moi, je me tire des ailes
vers des cieux autrement peignés,
Au paradis des hirondelles.

C'est un pays merveilleux, où
Toujours rutile un soleil fou.
Les saisons y sont sympathiques
et non comme ici, lunatiques.
L'air y est doux, tiède, béni,
On s'y peut croire dans un nid.
Là, les forêts les plus superbes
Vous font l'effet de touffes d'herbes.
Que dire encore ? ... Il va de soi
Que les glands sont gros comme toi ! "

Et le cochon répliqua : " Vère !
Est-ce qu'il pousse des choux,
Des choux et des pommes de terre ?
- Tu parles ! mon vieux, et quels choux !
- Bah ! je me trouve bien chez nous.
Et puis, veux-tu que je te dise ?
Moi j'en tiens pour la " marchandise ",
Et tout pays, au demeurant,
M'est notamment indifférent.

- Oui, mais voici le temps des brumes,
Des neiges, des gels et des rhumes ;
Il fait déjà froid. - Je m'en fous.
le froid est très bon pour les choux.
- Mais enfin, ce temps-là vous tue !
- Pas du tout, on s'y habitue.
Et d'ailleurs, mon pauvre oiselet,
Moi, je prends le temps comme il est.
- C'est entendu, mais, en voyage,
On voit de nouveaux paysages...
C'est en voyageant qu'on s'instruit.


Là-dessus, le cochon gruit :
- Voyager ! belle balançoire !
J'ai voyagé, tu peux m'en croire.
Encore cet été dernier
J'ai voulu changer de fumier.
Va ! c'est toujours la même chose,
Tous les fumiers sentent la rose ;
Quant à m'instruire, plus souvent !
A notre époque insociable,
Je veux bien me donner au diable,
Si cela sert d'être savant !


RAOUL PONCHON
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