26 janv. 2015

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BALLADE
en l'honneur de Ponchon
 
 
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Le mal d'ennui sévit en notre temps ;
Il nous éteint, nous jaunit, nous dévore !
Riches, pannés, cancéreux, bien portants,
Guillotinés ou gens que l'on décore,
Tous dans Paris geignent ! Je le déplore,
Mais ne pouvant habiter d'autre lieu,
Je lis Ponchon, en guise d'ellébore,
Il est si bon de s'égayer un peu !

Ponchon est gai parmi les mécontents ;
S'il parle grec, c'est à propos d'amphore.
Il ne lit pas des Sarcey attristants.
Zut pour le cuistre et pour la métaphore !
Quand au chagrin que l'amour fait éclore,
Comme il préfére être seul dans son pieu
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Il s'en bat l'oeil comme d'une pécore.
Il est si bon de s'égayer un peu !
Banville a fait des vers plus éclatants,
Nisard une oeuvre immense qu'on ignore,
Pierre Véron : "Comme on aime à vingt ans"
Bourget se scalpe et Floupette plangore ;
Mendès sourit au péché de Gomorrhe.
Chez Mallarmé je n'y vois que du feu.

Mais Ponchon seul a le rire sonore :
Il est si bon de s'égayer un peu !
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ENVOI.
Toi que Ponchon à trois genoux adore,
Déesse chauve, ô lune du ciel bleu,
Reconduis-le chez lui longtemps encore :
Il est si bon de s'égayer un peu !


 
Raoul Gineste *
le Courrier Français
29 décembre 1889
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(1) Ça dépend... (R. Ponchon)
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