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.CHRYSANTHEMEGALOMANIE
.Est-il bien nécessaire,
- Me demandait Delorme -
Qu’une fleur soit énorme
Pour avoir de quoi plaire ?
Il me parlait ainsi
Au dernier rendez-vous
Des chrysanthèmes fous
Exposés ces jours-ci.
Et je lui dis : « Delorme,
Il n’est pas nécessaire,
Pour avoir de quoi plaire,
Qu’une fleur soit énorme.
Et, tenez… bien qu’encor
Ces chrysanthèmes-ci
Nous étalent ici
Et leur pourpre et leur or ;
Bien qu’ils soient homériques,
Prodigieux, féeriques,
Superlatifs, lyriques
Et fantasmagoriques,
Tout ce que vous voudrez…
Pourquoi resté-je froid,
L’avuerai-je… à l’endroit
De ces exaspérés ?…
C’est que les chrysanthèmes
Semblent de la réclame ;
Ne me vont pas à l’âme ;
C’est qu’ils sont froids eux-mêmes.
Ils ont l’air de poser ;
Ils sont chiques, truqués,
Compliqués et toqués.
Autant me dégoiser
De la littérature.
Ce n’est pas de la sorte
Oh ! non - que se comporte
Cette vieille Nature.
Quand elle veut des fleurs
Géantes, en effet,
Elle-même les fait,
Et règle les couleurs.
Pourquoi par des tortures
Changer leur habitude,
Les mettre en servitude
En des carcères dures ?
Agrandir leur format,
Leurs nuances, leur port,
Qui ne son pas d’accord
Avecque nos climats ?
Aimez les chrysanthèmes
Spontanés de la France
Sans plus d’exubérance
Laissez-les être eux-mêmes.
Et pourquoi pas des lys
Hydropiques, crétins ?
Des myosotis atteints
D’éléphantiasis ?…
Il n’est rien d’aussi bête,
O jardiniers moroses
Que de vouloir des roses
Grosses comme ma tête…
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