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Quel est le cochon qui a écrit les
Mémoires de Talleyrand ?

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Sortirons-nous jamais de cet imbroglio ?
Muse de l'histoire, ô Clio !
Dis-nous l'auteur de ces mémoires,
Ou mieux de ces sombres grimoires.

Sont-ils de Talleyrand lui-même, quand vivant ?
Et le prince de Bénévent
(Rebus cruel ! dur logogriphe !)
Les a-t-il marqués de sa griffe ?

Non. Car plus d'un qui sait son Talleyrand par coeur
Dit : quel donc sinistre farceur
Voudrait nous faire croire - ah ! mince !
Que c'est là le style du prince ?

Ils ne sont pas non plus de monsieur de Bacourt ;
Gyp nous l'a déclaré tout court :
Il en fut le bon légataire
Si Broglie en fut le notaire.

Est-ce que par hasard monsieur de Broglio
Dont chacun vante le brio
Les a sortis de sa cervelle ?...
- Dites-moi la vache qui vèle

Et tôt je vous dirai la gueule qu'a son veau -
Dit un dicton pas bien nouveau ;
Ainsi, tenez, je puis vous dire
Sans avoir besoin de les lire


Que les lourds in-dix-huit vêlés par Jorjonez
Sont toujours mauvais - poil au nez
Et que les vers à mille pattes
De Delpit sont nuls - poil aux pattes.

Si ces mémoires ne sont pas de Talleyrand
Vous pouvez les lâcher d'un cran :
Ce serait misère et folie
De vouloir lire du Broglie !

Le duc les aurait-il traduit du renéghil,
Que l'on parle aux sources du Nil ?
Non, il n'est pas assez artiste
Evolutif-instrumentiste.

En tout cas, je voudrais avant de les ouvrir
Pouvoir leur auteur découvrir :
Ce serait misère et folie
De vouloir lire du Broglie.

Un jour, l'été dernier, j'ai pourtant essayé,
Sans être pour cela payé,
Comme de lire des énigmes :
Ca m'a foutu des borborygmes.



RAOUL PONCHON
le Courrier Français
12 avril 1891