14 sept. 2007

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EN BUVANT

Par toi-même ! ô bon vin vermeil !
J’ai pour toi le plus noble culte ;
N’es-tu pas la fleur du soleil :
Va, qui te méprise m’insulte !

Viens, ô bienfaisante liqueur,
Toi d’où me vient toute tendresse,
Que je te presse sur mon cœur
Ainsi qu’une jeune maîtresse.

Coule, ruisselle, répands-toi,
Mets ma veule cervelle en fête ;
Et promène-toi comme un roi
Depuis mon coeur jusqu’à ma tête.

Quand tu me pénètres, vois-tu,
Mon âme devient innocente ;
Je mérite un prix de vertu
Pourvu que nul ne se présente.

Le Vin est pour moi paternel,
Il prend mes maux et les expulse ;
Béni sois-tu, Père Eternel,
Qui miscuas l’utile au dulce.

D’aucuns ont le vin querelleur ;
Moi, quand j’ai bu, c’est le contraire :
Je deviens bon comme une fleur,
Et j’appelle chacun mon frère.

Je trouve le ciel plein d’appas
Même les jours, en quelque sorte,
Où il fait un temps à ne pas
Jeter une ordure à la porte.

Je gémis sur le Danemark.
- Pourquoi ? Je ne saurai le dire.
Je m’attendrirais sur Bismark
Si ça n’était pas du délire.

Ah ! Si j’étais roi, je voudrais,
Avant de donner audience,
Boire une coupe de vin frais
Afin de me mettre en clémence.



Raoul Ponchon
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